Cass. Com 13/10/2021 n° 704 F-D, Gerstaecker France c/ R art
Solution – La Haute Cour casse cette décision dès lors qu’« en statuant ainsi, alors qu'il s'infère nécessairement d'actes de concurrence déloyale résultant d'un tel risque de confusion un préjudice, fût-il seulement moral »
Observations – La solution d’appel avait, semble-t-il, été guidée par les pièces fournies par la défenderesse. Des mails de félicitations avaient en effet été envoyés à la société Gerstaecker et une personne indiquait être devenue son client, après avoir regardé les vidéos YouTube proposées par… son concurrent ! Autrement dit, cette dernière démontrait que, s’il y avait confusion, elle n’était pas préjudiciable à son concurrent. De son côté, la prétendue victime peinait à justifier son préjudice. La cassation est conforme à la jurisprudence fournie établissant une présomption de préjudice en matière de concurrence déloyale (Com., 27 mai 2008, pourvoi n° 07-14.442, Bull. IV, n° 105 ; 1re Civ., 21 mars 2018, pourvoi n° 17-14.582 ; Com., 28 septembre 2010, pourvoi n° 09-69.272 ; Com., 11 janvier 2017, pourvoi n° 15-18.669) ; jurisprudence qui a pris récemment un relief récent tout particulier (Cass. Com., 12 février 2020 n°17.31.614 ; Cass. Com., 17 mars 2021 n°19-10.414) Problématique 3 – La société R art a posté des messages sur sa page Facebook pour répondre à des questions d’internautes concernant le montant de ses frais de livraison. Et de préciser à cet effet que, contrairement à son concurrent, elle était une société française offrant des frais de livraison identiques sur le continent et en Corse. La société Gerstaeckerconsidère qu’il s’agit d’une publicité comparative illicite car trompeuse. La Cour d’Appel écarte cette demande dès lors que la société R Art s’était limitée à affirmer la qualité de ses services en réponse aux interrogations des internautes. Ce faisant, « il ne peut lui être imputé de propos dénigrants, cette information objective permettant une publicité comparative sur les coûts de livraison, élément important en matière de vente en ligne ».Solution – La Cour de cassation casse cette décision. La cour d’appel « aurait dû effectivement rechercher si l’information suggéré, selon laquelle la société Gerstaecker n'était pas française, n'était pas de nature à induire en erreur les personnes auxquelles elle s'adressait en raison de son caractère trompeur »
Observation – Il s’agit d’une application stricte des dispositions relatives à la publicité comparative (Art. L. 122-1 Code Consommation). Mais s’agissait-il réellement d’une « publicité » ? Même si certains arguments pourraient militer pour une réponse négative (réponse à une question d’internaute ; impact limité de l’emplacement de ladite réponse, notamment), cette notion est appréciée largement (« toute forme de communication faite dans le cadre d'une activité commerciale, industrielle, artisanale ou libérale dans le but de promouvoir la fourniture de biens ou de services, y compris les biens immeubles, les droits et les obligations », Art. 2 § 1 Directive 84/450/CEE). C’est en réalité le caractère éventuellement trompeur de ce message (donc le 1° de l’art. L112-1) diffusé sur un support de communication librement accessible et identifiant le concurrent que la cour d’appel de renvoi devra examiner. Il est vrai en effet que le Géant des beaux-arts est un groupe d’origine allemande – d’où certainement la référence du concurrent à sa nationalité française – mais qui dispose d’une filiale française ; filiale à l’origine de l’action. Et la saga de se poursuivre…