La Commission européenne avait condamné 14 groupes internationaux d'entreprises pour un montant total de 169 millions d'euros pour avoir participé, entre 2002 et 2007, à quatre ententes distinctes sur les prix et d'autres conditions de transaction dans le secteur des services de transit aérien international. Le 29 février 2016, le Tribunal de l'Union a rendu une série de six arrêts dans cette affaire, rejetant l'ensemble des recours formés contre la décision de la Commission à l'exception de l’affaire T-264/12 (UTi Worldwide, Inc. e.a.) aux termes de laquelle il réduit marginalement le montant de l'amende infligée à la société mère pour les agissements de ses deux filiales.
En effet la Commission avait retenu à l’encontre d’UTi Worldwide, en tant que société mère, un montant d’amende plus élevé que celui de l’amende infligée à ses deux filiales, UTi Nederland et UTI Worldwide (UK). Les requérantes soutenaient que l’amende infligée solidairement aux deux filiales ainsi qu’à leur société mère en raison du comportement allégué des deux premières s’établissait à 2 965 000 euros, tandis que l’amende infligée à la société mère au titre de sa responsabilité individuelle s’élève à 3 068 000 euros. Il en résulterait que, si les deux filiales versaient les montants de l’amende dont elles sont redevables au titre de leur responsabilité solidaire (2 965 000 euros au total), l’amende serait, de leur point de vue, entièrement payée, alors que la société mère UTi Worldwide resterait encore redevable de 103 000 euros. La Commission soutenait pour sa part que la différence entre les montants d’amende infligés aux requérantes s’expliquait par le fait que les périodes d’infraction imputées aux filiales ont fait l’objet d’un arrondissement à la baisse tandis que la période appliquée à la société mère ne nécessitait aucun arrondissement, de sorte que le traitement favorable appliqué aux filiales ne discriminerait pas la société mère parce que la durée de participation à l’infraction la plaçait dans une situation différente qui ne justifierait aucune réduction.UTI Worldwide (UK) a participé à l’entente du 19 mars au 21 octobre 2003, et UTi Nederland du 21 octobre 2003 au 19 août 2004. La société mère, UTi Worldwide, qui exerçait une influence déterminante sur ses deux filiales et formait donc avec elles une même entreprise auteur de l'infraction concernant l’AMS, a donc participé à l’entente du 19 mars 2003 au 19 août 2004, c’est-à-dire pour la période combinée de la participation de ses filiales. Toutefois, la Commission a procédé à l’arrondissement à la baisse de la durée de participation des filiales : pour UTI Worldwide (UK), laquelle a participé à l’entente pendant une période de 7 mois et 2 jours, cette période a été arrondie à la baisse à 7 mois, et, pour UTi Nederland, une période de participation à l’entente de 9 mois et 28 jours ayant été retenue, la période a été arrondie à la baisse à 9 mois. Au final, l’arrondissement à la baisse de la durée de participation des filiales a conduit à une remise cumulée d’une période d’environ un mois en leur faveur, qui n’a pas été accordée à la société mère.
Sur quoi le Tribunal juge (pts 329 à 331) que, « si, dans le cadre d’une relation capitalistique verticale de ce type, la société mère en cause est censée avoir commis elle-même l’infraction aux règles de concurrence du droit de l’Union, sa responsabilité pour l’infraction est entièrement dérivée de celle de sa filiale » et que, « dans la situation où la responsabilité de la société mère est purement dérivée de celle de sa filiale et dans laquelle aucun autre facteur ne caractérise individuellement le comportement reproché à la société mère, la responsabilité de cette société mère ne saurait excéder celle de sa filiale . Dès lors, par analogie, dans le cas où la responsabilité d’une société, en tant que société mère, est entièrement dérivée de celle de plusieurs filiales, la somme totale des montants auxquels elle est condamnée ne devrait pas excéder le montant auquel sont condamnées ces filiales ». Certes, le Tribunal rappelle également que des circonstances propres à la situation de la société mère ou de la filiale pourraient mener à des montants différenciés, comme dans le cas de la prise en compte de la circonstance aggravante de récidive retenue à l’encontre d’une société mère et non de sa filiale. Toutefois, « de telles circonstances particulières liées à la situation de l’une ou de l’autre société faisant partie de l’entreprise sanctionnée n’existent pas en l’espèce, le seul facteur en cause ici étant celui de la durée de participation à l’infraction, cette durée étant, en ce qui concerne la société holding, dérivée de celle de ses filiales » (pt. 333).
Au final, le Tribunal réduit le montant de l’amende imposée à UTi Worldwide de 103 000 euros et le fixe à un montant global de 2 965 000 euros, ce qui correspond à la somme des montants pour lesquels les filiales UTI Worldwide (UK) et UTi Nederland sont tenues pour responsables.