CA Paris, 15/02/2023, n°21/14049
La société LALIQUE commercialise une gamme de sept verres à pied baptisée "100 Points", sur laquelle elle revendique des droits d'auteur. Cette collection est décrite par le critique influant du monde du vin, James Suckling, comme « élégante et fonctionnelle ». Cette dernière estime que la société HABITAT a commis des actes de contrefaçon en commercialisant sa gamme référencée GLITZ.
Ce faisant, elle assigne HABITAT en contrefaçon de ses droits d’auteur et dessins et modèles, ainsi qu’en concurrence déloyale.
Cette procédure au long cours a donné lieu à un arrêt de cassation (Cass. Com. 23/06/21 n°19-18.111) avec renvoi devant la Cour d’appel de Paris.
Cette Cour avait condamné la société HABITAT à 200 000 euros pour des actes de contrefaçon de droit d’auteur et de modèles et à 80 000 euros pour des actes de concurrence déloyale et parasitaire. Est ainsi classiquement discuté la protection au titre du droit d’auteur, la contrefaçon et la concurrence déloyale et parasitaire.
Sur la protection au titre du droit d'auteur, la Cour de cassation avait cassé le précédent arrêt d’appel pour avoir notamment considéré que l'originalité de la tige des verres '100 Points' de la société LALIQUE n'était pas contestée, et que ce faisant cette dernière n’avait pas à être analysée.
Or, la Cour relève que la société LALIQUE ne fait que décrire techniquement les caractéristiques de la jambe de son verre "sans aucunement expliciter la démarche créative et le parti pris esthétique qui traduiraient les choix personnels d'un auteur et seraient le reflet de sa personnalité".
Ce faisant, aucun travail créatif résultant de choix arbitraire révélant la personnalité de la société LALIQUE n’est démontré. La tige du verre ne peut donc être protégée au titre du droit d'auteur.
Sur la protection au titre des dessins et modèles, les juges vont minutieusement analyser les verres litigieux des deux modèles déposés, afin de rechercher si des différences existent, ou si un acte de contrefaçon peut être caractérisé.
Les juges affirment que "la tige des verres HABITAT est uniformément lisse, dépourvue de toute strie verticale" contrairement aux modèles des verres LALIQUE. Cette absence de strie produit sur l'utilisateur averti une impression visuelle globale distincte entre les deux modèles de verre.
Nouvel échec de la société LALIQUE dès lors que "l'impression visuelle d'ensemble suscitée par les verres incriminés étant distincte de celle produite par les modèles, la contrefaçon des modèles n'est pas caractérisée".
Sur la concurrence déloyale et parasitaire, les arguments de la société LALIQUE ne prospèrent pas davantage.
En effet, au regard des habitudes du secteur, de l'absence de détournement de clientèle, de l'absence de substituabilité ou complémentarité des produits en question du fait de leur coût, et des différences entre les produits, aucun acte de concurrence déloyale ou parasitaire n'est identifié.
En définitive, la société LALIQUE se voit débouter de toutes ses demandes en réparation et ce après plus de cinq années de procédure…