« Jeu de Questions/Réponses » Juillet 2013
Le décret du 2 octobre 2012 (n°2012-1115)a fixé à 40 € l'indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement que tout professionnel doit régler depuis le 1er janvier 2013 en cas de retard de paiement.
Une note d'information de la DGCCRF du 29 novembre 2012 est venue préciser les contours de cette obligation tant d'un point de vue formel qu'au niveau du fond. Ce travail de clarification a été complété par le jeu de Questions/Réponses mis en ligne en avril 2013 par la DGCCRF et depuis actualisé.
Il ressort de ces précisions que cette indemnité :
- n'est pas soumise à TVA et s'ajoute aux intérêts de retard également dus de plein droit ;
- doit être rattachée à l’exercice fiscal de son encaissement ou de son paiement ;
- doit être obligatoirement mentionnée sur les CGV et les factures postérieures au 1er janvier 2013 ; sans qu’il soit nécessaire de conclure un avenant aux contrats conclus avant cette date ;
- peut figurer au sein des Conditions Générales d’Achat, sans que cela ne soit obligatoire ;
- doit figurer sur les factures émises par les sociétés de droit français pour des achats effectués par des sociétés étrangères ; de même l’acheteur français de produits vendus par une société étrangère doit réclamer un facture conforme au droit Français ;
- est due même cas de retard de paiement des factures mentionnant une échéance à réception.
Il conviendra d'être vigilant, le défaut d’information sur l'indemnité est pénalement répréhensible (15.000 € pour omission dans les conditions de règlement, 75.000 € pour omission dans les factures).
Cour de Cassation, chambre commerciale, 18 décembre 2012, n°11-27.342, affaire Guigal
La Cour de cassation a condamné les pratiques de la société Guigal, fournisseur de vin, qui prévoyait dans ses accords cadre de distribution d'exclure toute possibilité de commercialiser ses produits en grande surface.
A l'occasion de cette affaire, la Cour de cassation est venue appliquer sa solution traditionnelle en matière de distribution sélective en rappelant qu'un tel réseau de distribution n'est licite que lorsque « le choix des revendeurs s'opère en fonction de critères objectifs, de caractère qualitatif, fixés d'une manière uniforme à l'égard de tous les revendeurs potentiels et appliqués de façon non discriminatoire ».
Pour la première fois à notre connaissance, la Haute juridiction a appliqué cette solution au domaine viticole. Ce faisant, il est donc déconseillé pour un vigneron d'exclure un de ses clients d’un réseau de distribution en tant que tel (comme la grande distribution par exemple).
Projet de loi dit « Hamon » relatif à la consommation, adopté par le Sénat le 13 septembre 2013
Considérant que les sanctions pénales et civiles traditionnelles en cas de non-respect des délais de paiement en matière commerciale sont inefficaces en raison notamment de l'encombrement des tribunaux civils, le projet de loi relatif à la consommation remplace ces sanctions par des amendes administratives.
L’objectif est clair : efficacité dans le recouvrement des sanctions pour l’administration.
Les acteurs du secteur doivent donc être attentifs à l’adoption définitive de ce projet de Loi (fin 2014 ou début 2015 ?) et à la conformité de leurs documents contractuels, commerciaux et de leurs pratiques de règlement.
Le décret du 4 mai 2012 (D. n° 2012-655)relatif à l'étiquetage et à la traçabilité des produits vitivinicoles et à certaines pratiques œnologiques est venu transposer le règlement communautaire d'organisation des marchés dans le secteur agricole du 22 octobre 2007 (règlement n°1234/2007) et des textes pris pour son application.
Ce décret, entré en vigueur le 1er juillet 2012, prévoyait une période transitoire, permettant aux producteurs de commercialiser jusqu'à épuisement de leur stock, des vins conformes aux anciennes dispositions, mis sur le marché ou étiquetés au plus tard au 30 juin 2013.
Depuis le 1er juillet 2013 de nouvelles règles sont applicables en la matière, dont voici les grandes lignes :
- complément de noms de cépages : l'étiquette d'un vin ne bénéficiant pas d'une AOP ou d'une IGP peut être complétée par un ou plusieurs noms de cépages, à l’exception des noms de cépage suivants : Aligoté, Altesse, Clairette, Gewurztraminer, Gringet, Jacquère, Mondeuse, Persan, Poulsard, Riesling, Savagnin, Sylvaner et Trousseau (article 3 al. 1 du décret),
- mention des cépages : si le vin dispose de plusieurs cépages, et bénéficie d'une AOP ou d'une IGP, chaque cépage qui représente plus de 15% de l'assemblage du vin, lorsque celui-ci est issu à 100% de ceux-ci, doit être indiqué par ordre décroissant (article 3 al. 2 du décret),
- mentions « château », « clos », « cru » et « hospices » : réservées aux vins bénéficiant d'une AOP lorsque les vins sont issus de raisins récoltés sur les parcelles d'une exploitation ainsi dénommée et vinifiés dans cette exploitation (article 7 du décret),
- mention « mis en bouteille »: ne peut être utilisée que pour un vin bénéficiant d'une AOP ou d'une IGP et n'ayant pas été transporté hors de l'exploitation avant sa mise en bouteille (article 10 al. 1 du décret),
- mention de l'embouteillage à la propriété : ne peut être utilisée que pour les vins bénéficiant d'une AOP ou d'une IGP, et dont la mise en bouteille a été effectuée dans l'exploitation viticole où ont été récoltés et vinifiés le raisin ou dans la cave coopérative qui a procédé à la vérification et n'ayant pas été transporté (article 10 al. 2 du décret),
- mentions relatives à la fermentation, à l'élevage et au vieillissement des vins : ne peuvent être indiquées dès lors que l’ensemble du vin revendiquant une de ces mentions a été fermenté, élevé ou vieilli dans des récipients en bois et que, pour 50 % au moins de son volume, il l’a été pendant une durée minimale de six mois (article 11 du décret).
Le règlement d'exécution de la Commission Européenne du 29 juin 2012 (n°579/2012), impose à partir du 1er juillet 2013 de mentionner sur l'étiquette des bouteilles de vin la présence d’œuf ou de lait en raison de leur potentiel allergène.
L'étiquette devra désormais mentionner notamment : « œuf », « protéine de l'œuf », « produit de l'œuf », « lysozyme de l'œuf », « albumine de l'œuf », « lait », « produit du lait », « caséine du lait », « protéine du lait ». Et ce, éventuellement précédé de la mention « contient ».
Arrêté du 13/02/2013
Un arrêté du 13 février 2013 a modifié les conditions d'autorisation des concours vinicoles en France.
Ainsi, depuis le 1er juillet 2013, tout opérateur du secteur souhaitant apposer des médailles sur l'étiquette doit (i) justifier d'avoir participé à un concours respectant les nouvelles règles (égalité entre compétiteurs, échantillon présenté issu d'un lot homogène, impartialité du jury...), (ii) tenir à disposition des agents de l'administration pendant un délai d'un an à compter du déroulement du concours les échantillons des vins présentés, accompagnés de fiches de renseignements et de bulletins d'analyse.
Cour de cassation, 1ère chambre civile, 1er juillet 2013, n°12-22633
En juin 2011, la société Ricard a lancé une campagne de publicité intitulée « Un Ricard, des rencontres » diffusée notamment sur internet, par le biais d'une application mobile gratuite, dite « Ricard Mix Code », nécessitant un compte Facebook et permettant : (i) de visionner un film publicitaire, (ii) de collecter des codes donnant accès à des cocktails à base de Ricard que l'utilisateur pouvait partager sur son mur Facebook avec son réseau « d'amis ».
Cette action faisait apparaître sur le profil Facebook de l'intéressé ainsi que dans le fil d'actualité de ses amis le message « J'ai découvert la rencontre # 20 ATOMIC RICARD (ou # 92 RICARD MANGO ou autre). Vous aussi récupérez les Ricard Mix avec l'application Ricard Mix Codes. Disponible sur l'Appstore ».
L'Association nationale de Prévention en Alcoologie et Addictologie (l'ANPAA) a assigné Ricard en soutenant que cette campagne contrevenait aux dispositions du Code de la santé publique limitant la publicité pour les boissons alcoolisées à « l'indication du degré volumique d'alcool, de l'origine, de la dénomination, de la composition du produit, du nom et de l'adresse du fabricant, des agents et des dépositaires ainsi que du mode d'élaboration, des modalités de vente et du mode de consommation du produit » (article L. 3323-4 du Code de la santé publique).
La Cour de cassation a, de son côté, relevé que le slogan « Un Ricard, des rencontres » renvoie dans l'esprit du consommateur au rapprochement entre personnes, « associant ainsi la boisson alcoolisée avec la possibilité de nouer des relations inattendues et fortuites » constituant ainsi « une incitation directe à consommer du Ricard dans le but de vivre des moments de convivialité . Ce faisant, il est jugé que cette campagne est illicite au regard du texte précité et de son caractère intempestif, inopiné, et systématique.
En conclusion, si l’interdiction de toute publicité n’est pas en tant que telle prohibée sur les réseaux sociaux, il convient toutefois de sécuriser la campagne de communication envisagée au regard de la réglementation stricte précitée. Pari impossible ?A suivre….
Cour de cassation, chambre commerciale, 20 novembre 2012, aff. Diptyque
En 2008, la société Hennessy a déposé la marque « Diptyque » pour désigner des boissons alcoolisées, alors qu'antérieurement, en 1981, une autre société avait déposé cette même marque pour désigner notamment des parfums et des bougies.
Dans cette affaire, la Cour de cassation retient que cette situation est constitutive d'une publicité indirecte pour une boisson alcoolisée, prohibée au sens de l'article L. 3323-3 du Code de la santé publique. En effet, ces dispositions prohibent toute publicité pour un produit autre qu'une boisson alcoolisée qui rappelle une boisson alcoolisée et ce, notamment, par sa dénomination.
La Cour prononce sur ce fondement la nullité de la marque « Diptyque » aux motifs qu'elle bénéficierait d'une publicité indirecte lorsque seraient évoqués les produits de la première marque « Diptyque ».
Cette décision rappelle ainsi l'impérieuse nécessité de procéder à une recherche élargie d'antériorités avant tout dépôt d'une marque pour la désignation de vins.
Cour d'appel de Montpellier, 2ème chambre, 3 mai 2012, n°11/04238
Une société française utilisant depuis 1997 la marque « Chateau Saint-Estève Altaïr » en a demandé l'enregistrement en 2004. A la suite de cette demande, une société Chilienne qui avait fait enregistrer en 2003 la marque « Altair » a formé opposition.
Concomitamment, la société française a agi en revendication de la marque et subsidiairement en nullité sur le fondement de l'article L. 711-4, b) du Code de la propriété intellectuelle qui prévoit que « ne peut être adoptée comme marque, un signe portant atteinte à une dénomination ou raison sociale, s'il existe un risque de confusion dans l'esprit du public ».
Ainsi, dans cette affaire, la Cour d'appel de Montpellier a prononcé l'annulation de la marque de la société Chilienne en se fondant sur le fait que la société française disposait d'un droit d'usage antérieur du signe « Altair », et que, tenant cette situation, il existait un risque de confusion.
Cette décision rappelle une fois de plus la nécessité de procéder à des recherches avant tout dépôt d'une marque en matière viticole, et invite à vérifier si une autre personne ne dispose pas d'un droit d'usage antérieur.
Cour de cassation, chambre commerciale, 26 mars 2013, n°12-10.204
Entre 1994 et 2004 la Société Vignoble du Château de Moncontour a acquis plusieurs lots de caisses palettes en bois d'occasion auprès de plusieurs fournisseurs. Après avoir constaté que ses vins avaient mauvais goût en raison d'un traitement des caisses au pentachlorophénol (PCP), la société a agi en résolution des contrats de vente et en indemnisation sur le fondement de la garantie des vices cachés.
La Cour de cassation rejette ces demandes considérant que « depuis 1996, les professionnels de la filière viticole étaient informés des risques de développement de certains goûts de moisi dans les vins du fait de la présence dans les chais de bois traités au PCP ».
Ainsi, pour les magistrats, la société Vignoble du Château de Moncontour n'a pas respecté les préconisations du décret de 1994 relatives au traitement des caisses au PCP, dans la mesure où, en tant que professionnel averti, elle aurait dû effectuer des vérifications élémentaires.
En effectuant ces vérifications, la société Vignoble du Château de Moncontour aurait dû elle-même se convaincre du vice ; raison pour laquelle l'indemnisation sur le fondement de la garantie des vices cachés est refusée.
De façon plus générale, cette situation impose aux acteurs du secteur viticole de sécuriser leurs achats par le biais de procédures telles que : précisions lors de la commande, réserves sur les bons de livraison, vérifications préalables compte tenu de leur « compétence », négociation des contrats et mise en place de conditions générales d’achat.