Réfactions tarifaires pour non-conformité des fruits et légumes frais : l’accord INTERFEL non étendu pour autant applicable à l’ensemble de la filière ?
Note d’information n°2014-190 ; Accord interprofessionnel du 21 mai 2014 (http://www.economie.gouv.fr/dgccrf/pratique-des-rabais-en-matiere-dachat-fruits-et-legumes-frais)
Pour rappel, l’article L.441-2-2 C. com. prohibe, sous quelque forme que ce soit, l’obtention de rabais, remises et ristournes pour l’achat de fruits et légumes frais. Toutefois, le texte, tel que modifié par la loi Hamon, permet aux opérateurs de la filière de consentir à des réfactions tarifaires dès lors que les produits livrés sont non conformes à la commande et qu’un accord interprofessionnel en précise les conditions ; accord qui peut être étendu conformément aux articles L.632-3 et L.632-4 C. rur. La conclusion d’un tel accord est en effet « rendue nécessaire pour permettre à l’ensemble des opérateurs (producteurs comme entreprises clientes) de disposer de la même interprétation de la notion de non-conformité et des conditions d’application des réfections » (Annexe 1 note d’octobre 2014). Le 21 mai 2014, un accord a ainsi été conclu à l’initiative de l’association interprofessionnelle des fruits et légumes frais (INTERFEL). Cet accord, qui est valable trois ans, fixe les conditions d’application des réfactions tarifaires : ces dernières doivent avoir été prévues au préalable par le contrat, des conditions générales ou par tout document contractuel ; la non-conformité du produit doit être justifiée par un relevé d’opérations ou d’agréage et notifiée dans un délai ne pouvant excéder 24 heures suivants la livraison ; sauf stipulation contraire précisée dans des conditions générales de vente, la demande de réfaction tarifaire doit être adressée au fournisseur dans les deux jours ouvrés suivants la livraison. Pour s’appliquer à l’ensemble des acteurs de la filière, et donc aux non-signataires, l’accord devait donc être étendu (article L.441-2-2 ; note DGCCRF octobre 2014). La DGCCRF semble en décider autrement.
Sur son site internet apparaissait en effet récemment, concernant l’accord précité, la conclusion suivante : « les opérateurs du secteur des fruits et légumes frais, même non membres de l’INTERFEL, bénéficient de cet assouplissement sous réserve de respecter les conditions prévues dans cet accord » (site internet DGCCRF 2 mars 2015). A première lecture, cette affirmation semble peu sécurisée pour les opérateurs concernés dès lors qu’à notre connaissance aucune extension de l’accord n’a été réalisée. Ce raccourci trouve toutefois son explication dans une note d’informations adressée aux services centraux et régionaux de la DIRECCTE (note d’information n°2014-190). La DGCCRF prenant en compte l’accord INTERFEL y précise en effet que « la nécessité d’une telle extension ne se pose pas ici avec la même acuité que pour un accord prévoyant par exemple le versement de cotisations destinées à financer les actions de l’interprofession ou le respect de normes spécifiques car, pour que de telles sujétions puissent être imposées aux opérateurs non membres de l’interprofession, il faut effectivement que l’accord ait été étendu. Nous ne sommes pas ici dans ce cas de figure puisque les dispositions du présent accord, loin d’imposer des sujétions aux opérateurs du secteur, leur permettent au contraire de pratiquer des rabais lorsque l’état des produits livrés le justifie ». Et l’administration d’en conclure que « si les opérateurs du secteur, qu’ils soient ou non membres d’INTERFEL, respectent les conditions prévues dans cet accord, les rabais pratiqués par ces intervenants ne sauraient être regardés comme des manquements aux dispositions de l’article L.441-2-2 modifié du code de commerce ». C’est donc l’équité qui justifierait cette interprétation libérale, voire contra legem. L’objectif étant, semble-t-il (à nouveau), d’éviter que des clients non membres des organisations signataires rejettent l’ensemble des marchandises non-conformes et pénalisent ainsi les producteurs. Pour autant, la sécurité juridique des opérateurs non-signataires qui appliqueraient ces réfactions est-elle totalement garantie, même s’ils respectent les conditions définies au sein de l’accord INTERFEL ? A suivre…
Aymeric LOUVET