Un domaine viticole de la région – assisté par notre Cabinet – collabore depuis plusieurs années avec un représentant commercial indépendant qui commercialise ses vins dans le nord de la France.
Après quelques années de relations, et apprenant que ce représentant intervient pour le compte d’un concurrent, le Domaine met un terme aux relations sans préavis pour faute grave.
Le représentant commercial ne l’entend pas ainsi et saisit le Tribunal de Commerce de Lille pour obtenir réparation du préjudice qu’il estime avoir subi.
Pour ce faire, celui-ci fonde d’abord ses demandes sur le statut d’agent commercial et sollicite à cet effet le paiement de l’indemnité qui leur est spécifique fixée ici à deux années de commissions calculée sur la moyenne des deux dernières années.
Suivant en cela l’argument développé par le Domaine, le Tribunal de Commerce rejette cette demande au motif que le statut d’agent commercial n’est pas applicable.
Pour ce faire, le Tribunal relève qu’aucun contrat n’avait été conclu et qu’un seul courriel faisant référence à un contrat d’agent n’est pas suffisant à faire application du statut spécifique.
Il appartenait en effet au demandeur de justifier des conditions cumulatives relatives à l’application du statut, à savoir : négocier et éventuellement conclure des contrats, de façon permanente et indépendante, au nom et pour le compte du mandant.
Or, en l’espèce le représentant ne disposait pas du pouvoir de négociation dès lors que le Domaine était seule habilité à fixer les prix, le contenu des contrats et les discuter avec les clients.
Le représentant précautionneux avait fondé par ailleurs ses demandes sur la rupture brutale des relations commerciales établies.
Ces dispositions – qui ne s’appliquent pas aux agents commerciaux dont le préavis est fixé par le statut spécial applicable – sont ici opposables dès lors que ce statut spécifique a été écarté par le Tribunal.
Or, au titre de ces dispositions commerciales générales, l’auteur de la rupture doit respecter un préavis tenant compte notamment de la durée des relations d’affaires, sauf à démontrer une faute grave.
La question de la représentation de vins concurrents et donc de la faute grave était donc posée.
Le Tribunal fait la aussi sienne l’argumentation du Domaine et considère que même s’il s’agit d’une vente de BIB pour des AOC identiques – et non de bouteilles (ce qui au demeurant n’était pas prouvé) – le représentant a manqué à son obligation de loyauté.
Celui-ci aurait dû en effet prévenir et obtenir l’agrément du Domaine, ce qu’il n’a pas fait.
La totalité de ses demandes sont rejetées. Pire, il se voit condamné à devoir régler au Domaine 3.500 euros d’art. 700.
Mais ce feuilleton judiciaire n’est peut-être pas terminé, un appel de la décision est en effet toujours possible….